Quand le stylo devient une œuvre d’art
Namiki est certainement LA marque de stylos la plus exclusive, celle dont les modèles les plus sophistiqués atteignent les prix les plus extrêmes, pouvez-vous nous en rappeler brièvement l’histoire ?
Christophe Larquemin : « Elle a été créée par Ryosuke Namiki au début du siècle dernier. C’est au cours de sa carrière dans la Marine marchande japonaise que cet ingénieur va déposer un brevet sur l’amélioration du stylo puis leur décoration avec de la laque urushi. Dans les années 30, il rencontrera le succès grâce à Alfred Dunhill qui implantera ses produits à travers le monde. Puis Namiki deviendra Pilot, premier groupe d’instruments d’écriture aujourd’hui…
La maison est notamment connue pour ses stylos utilisant des techniques de laque japonaise ancestrales, qui font de certaines de ses pièces de véritables petites œuvres d’art. En quoi les techniques utilisées sont-elles exceptionnelles ?
Le caractère exceptionnel du travail de la laque provient essentiellement du savoir-faire des artistes japonais et des matériaux utilisés. Il n’existe que quelques maîtres laqueurs de haut niveau à travers le monde, d’où la rareté des pièces majeures. Il faut plus de 13 années d’apprentissage à un élève pour maîtriser toutes les techniques de laque, et il n’y a que peu d’élus. Si l’on ne compte qu’un Picasso ou un Renoir par siècle on peut en dire autant pour les génies de la laque !
Comment en êtes-vous vous-même parvenu à choisir de représenter cette maison très exclusive ?
J’ai toujours été intéressé par le luxe et l’artisanat de qualité comme peuvent le promouvoir des maisons comme Hermès pour le cuir ou Patek Philippe pour l’horlogerie… J’ai découvert la marque Namiki lorsque j’étais directeur de la maison Cassegrain, plusieurs collectionneurs de stylos m’ayant alors demandé de leur commander des stylos Namiki. Ayant contact avec la marque, la découverte de cet univers authentique a été une vraie révélation pour moi, et c’est tout naturellement que je me suis attelé à promouvoir les plumes Namiki quand j’ai monté ma structure dans le domaine de l’écriture.
En tant que principal ambassadeur de la marque à Paris et en France, à quelle clientèle vous adressez-vous ?
Elle est variée… Cela va du simple amateur qui veut un Namiki pour compléter sa collection, au passionné qui recherche les modèles les plus rares. Il y a aussi de plus en plus d’investisseurs qui voient dans la marque une opportunité de spéculation. Mes clients ont néanmoins des caractéristiques communes : ils ont les moyens mais manquent de temps à consacrer à leur collection ou à leur investissement. Je leur offre donc mes services. Par souci de discrétion je ne peux vous donner de noms mais la plupart sont chefs d’entreprise, banquiers ou dans le domaine artistique, voire sportif.
Ce statut d’ambassadeur nécessite-t-il un stock important, et si oui quelles pièces choisissez-vous d’avoir toujours disponibles ?
Il est primordial d’avoir toujours en stock une gamme représentative car on ne sait jamais quel client on va rencontrer le mois prochain… Aussi, je garde toujours dans mon coffre quelques modèles vintage très rares, et je présente constamment la majeure partie de la collection moderne Namiki. En dernier recours, je dévoile certaines pièces de ma collection personnelle.
Pour ce que l’on en sait, outre leur statut de référence de la spécialité, les stylos Namiki présentent aussi la particularité de conserver une grande valeur en collection, et par conséquent de voir exister un marché des pièces d’occasion. Comment gérez-vous ce marché ? Existe-t-il une sorte de “côte Argus” des stylos Namiki, comme il en existe une des montres Patek Philippe par exemple ?
C’est un marché de niche. Il n’existe que très peu de collectionneurs de haut vol, à peine plus d’une centaine au niveau mondial. Je veux parler des personnes qui dépensent plusieurs centaines de milliers d’euros par an sur le marché de l’écriture. Pour ce qui me concerne je suis devenu au fil des ans une sorte de trader et je conseille mes clients dans leurs investissements. Je recherche pour eux les pièces les plus rares à travers le monde. Il ne restait que 1500 stylos de bonne facture après guerre, et ce n’est donc pas une activité aisée… Vu le faible nombre de protagonistes haut de gamme, le marché n’est pas liquide et mes clients ont vite compris que leur manque d’expertise leur était préjudiciable. Il y a de plus en plus de collectionneurs alors que le nombre de pièces majeures diminue chaque année, ce qui fait logiquement monter les prix et attire les spéculateurs.
Et pour répondre à la deuxième partie de votre question : non, il n’existe pas réellement de côte, les prix des plumes sont fixés en fonction des ventes aux enchères, d’e-bay et des bourses d’échange, appelées plus communément «penshows» dans le milieu.
La collection ne se compose tout de même pas que de pièces très chères (jusqu’à 300.000 euros), quel est le premier prix Namiki, à quelle pièce correspond-t-il, et ensuite quelles sont les grandes catégories de pièces de la collection ?
Il faut avant tout dissocier les modèles modernes et vintage. Pour la première catégorie, les prix vont de 500 euros pour les plus basiques à quelques dizaines de milliers d’euros pour les éditions limitées en passant par des modèles à 3000, 5000, voire 8000 euros selon les techniques de laque. Mais vu leur faible production, les collectionneurs avertis s’intéressent vite d’avantage aux pièces anciennes plus authentiques et plus travaillées. Et selon la complexité de réalisation, l’année ou encore la signature du maître, les prix peuvent s’envoler et il n’est pas rare de voir des plumes Namiki datant des années 30 atteindre des records. On est alors passé dans le domaine de l’art, où la question financière est souvent devenue secondaire et où la passion devient déraison… »
Pour plus d’informations : Velvet, 9 rue Royale – 75008 Paris.
Tél. : 01.49.24.05.77. www.velvet-stylos.fr