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Oxymore

L’audace discrète de son style en fait une sorte d’oxymore de la spécialité, et fait tout son charme. Héritier spirituel du style Arnys, Berteil n’a d’équivalent, pour tous les amateurs du genre, que Walker Slater, très typé scottish style, et Degand, sur un positionnement nettement plus haut de gamme. Un style historique et un positionnement choisi par Vianney Houette, qui a racheté l’enseigne il y a cinq ans. Pour la première fois il s’en explique, et dissèque pour Dandy les codes de la maison

Si on ne sait pas s’il y a une vie après le dandysme, Vianney Houette démontre qu’il peut y en avoir une avant. Au sortir de son école de commerce, le garçon fait ses premiers pas professionnels chez Yves Saint Laurent aux Etats-Unis avant de rentrer en France pour travailler pendant onze ans dans la grande distribution, où il s’occupe du marketing avant de prendre en charge les projets internationaux, puis d’assurer pendant sept autres années le secrétariat général d’un groupe d’assurance. De son premier emploi il conserve le souvenir d’une révélation : « J’y ai été subjugué par le souci du détail, de la qualité, des matériaux, par l’importance que l’on donnait au travail en amont, à ce qui ne se voyait pas. Cela m’avait beaucoup impressionné ». Au terme de ces vingt premières années de carrière l’entrepreneur prend le pas sur le salarié, et il se met en quête d’un rachat d’entreprise. Celle dans laquelle il veut s’investir devra répondre à trois critères : être une maison fabriquant des produits de belle qualité, ayant une histoire, et nécessitant d’être relancée. En d’autres termes une « belle endormie ». Il la trouve rapidement en Berteil, qui le séduit immédiatement. La maison appartient à la famille fondatrice depuis 1840, possède des boutiques à Paris et Deauville, ses propriétaires ont l’âge de prendre leur retraite et aucun héritier ne veut prendre leur suite. Avec un petit groupe d’actionnaires, Vianney Houette rachète l’entreprise en 2016. La maison a toujours respecté cinq fondamentaux qui lui rappellent son ressenti chez YSL vingt ans plus tôt : « Jamais aucune concession sur les matières, jamais de concession sur la fabrication, beaucoup de couleurs, pas de mode, pas de luxe. »

Dandy : Voilà cinq commandements qui demandent à être explicités…

Vianney Houette : « Jamais de concession sur les matières : 80% de celles qui me sont proposées ne passent pas le pas de la porte. Jamais de concession sur la fabrication : il serait tentant de faire faire quelques petites productions vite-faites-mal-faites dans des pays exotiques, on ne le fait jamais. En revanche Catherine, la directrice de production, et moi-même, nous déplaçons beaucoup dans les ateliers et les manufactures, pour aller voir comment les produits sont fabriqués : avec quel soin, quelle attention, quel type de fil, combien de points de couture au centimètre… Beaucoup de couleurs parce que cela fait partie de notre ADN : on est connus pour cela et on y prend beaucoup de plaisir. Deux exemples précis pour étayer mon propos : nous avons 35 couleurs par collection de pulls et 30 à 35 par collection de pantalons en velours. Et on les vend, même des couleurs étonnantes, parce que l’on a des clients férus de couleur. Dernier fondamental : pas de mode, au sens où ce que l’on achète chez nous doit pouvoir être porté pendant des années, et se doit donc à une certaine intemporalité. Cela ne veut pas dire que l’on ne regarde pas ce qui se passe : on est très intéressés par les tendances, par l’air du temps que l’on renifle au Pitti, mais on ne retient que ce qui nous semble durable. Sans aucun mépris de notre part donc, pas de mode au sens où Berteil n’a pas à suivre la mode, où nous en sommes libérés. On ne veut pas que le style soit imposé mais que chaque client soit libre de créer le sien propre : à nous de lui apporter des pièces pour le faire. Enfin, dernier point : pas de luxe, qui est un mot un peu poisseux car on ne sait plus trop ce qu’il veut dire. Le prix de nos produits reflète le soin qui a été apporté à leur fabrication et la qualité de leurs matériaux, et le client ne paye pas la marque Berteil, qui est juste là pour rassurer : nous travaillons beaucoup sur les tarifs de manière à ce qu’un maximum de gens puisse bien s’habiller pour un budget décent.

Il est vrai que lorsque l’on voit les images des looks sur le papier, on se dit que cela doit être assez cher ; et lorsque l’on passe à la boutique on s’aperçoit que tout est assez accessible : vestes, gilets, pantalons…

Je suis ravi que cela se voie, parce que c’est un effort considérable. Il y a en ce moment une tendance qui consiste à dire « Achetez moins mais achetez mieux » dans laquelle on se retrouve tout à fait : n’achetez plus trois vestes quelconques mais une belle, et pareil pour le pantalon, le gilet, le manteau…

Qui est le client Berteil ?

Il n’y a pas un profil-type mais plusieurs tribus, que j’ai appelées Classique-Chic, Dandy et Découvreurs. Le classique-chic est un monsieur de 55 ans qui n’achète pas pour acheter : il vient régulièrement pour s’acheter de belles pièces, dont il prend soin et qu’il garde, il veut donc qu’elles soient intemporelles. Le dandy vient chercher chez nous des pièces qu’il ne trouve pas ailleurs et est très demandeur de personnalisation. Enfin, clientèle relativement récente : la tribu des découvreurs, qui ont entre 30 et 45 ans, commencent à prendre goût à s’habiller et ont besoin qu’on les guide un peu, même s’ils savent ce qu’ils veulent. Ce sont des gens qui viennent chez nous parce qu’ils savent qu’ils peuvent toucher les tissus, poser des questions, et qu’ils sont toujours bienvenus. Ces gens qui n’achètent rien ne m’inquiètent pas parce que je sais qu’ils vont revenir, poser de nouvelles questions, puis revenir encore, et qu’ils finiront par acheter en parfaite connaissance de cause.

Comme tu viens de le dire, les tissus sont l’une des caractéristiques fortes de l’ADN de Berteil, pour leurs qualités intrinsèques et pour leurs couleurs. Quels sont-ils et comment les sélectionnes-tu ?

Ce qui change tout pour nous est que l’on a mis en place un atelier interne qui nous met en capacité de production, parce que cela m’évite de passer sous les fourches caudines de fabricants qui m’imposeraient de passer par leurs fournisseurs de tissus ou par leurs modèles. A partir du moment où tu as ton propre atelier de fabrication, tu peux acheter tes tissus à qui tu veux et tu as accès à un panel de fabricants beaucoup plus large. Pour répondre précisément à ta question, on travaille le coton, la laine, le lycolin (mélange lyocell, lin et coton, ndlr), le coton, le cachemire, et deux matières pour lesquelles nous sommes renommés, nos matériaux de prédilection, qui sont le tweed et le whipcord. J’ai une passion pour le tweed, Je pense que nous en avons aujourd’hui plus de cent différents. Le tweed c’est plus une philosophie qu’un produit, et c’est un matériau formidable, dont nos clients sont très demandeurs, qui viennent chercher chez nous des choses un peu originales – nous sommes même en capacité de dessiner nous-mêmes un tweed exclusif. Entre les différentes épaisseurs, la trame de fond, le nombre de lignes, le nombre de couleurs, la provenance d’Irlande, d’Angleterre ou d’Allemagne, les possibilités sont infinies…

Le coton est un marché compliqué, sur lequel se côtoient des tissus magnifiques et d’autres qui n’ont aucune tenue et aucun intérêt. Nous sommes donc très exigeants et on travaille très bien avec des cotons anglais, mais je ne m’avancerais pas sur l’origine de leur fibre – entre Egypte, Inde, Etats-Unis et Chine c’est compliqué : ce qui m’intéresse c’est la matière transformée, et nous avons trouvé des fabricants qui nous font des serges formidables, des cotons légers pour faire des sahariennes, des lourds pour faire des vareuses…

Avec le cachemire j’ai un problème parce que le terme a été tellement galvaudé qu’il est aujourd’hui difficile à comprendre. Si on veut un beau cachemire, il faut le prendre sur une chèvre qui a eu froid – donc qui a vécu en altitude – parce que si elle n’a pas eu froid elle n’a pas développé la toison qui nous intéresse, qui provient du poitrail de l’animal. Ensuite, si on veut faire les choses correctement, le cachemire doit être teinté à l’état de poil et pas plus tard : s’il l’est une fois qu’il est filé cela esquinte la fibre – ce qui est beaucoup plus compliqué parce que cela impose de décider à l’avance la quantité de fils que l’on va faire dans une couleur ou dans une autre. Ensuite il y a le tricotage, que nous effectuons pour notre part sur des machines anciennes, hydrauliques, parce qu’elles donnent un résultat infiniment plus moelleux que les machines modernes, qui sont électriques. Si on respecte tout cela, à la fin on a une matière formidable qui va se bonifier avec le temps, gagner en souplesse et en douceur. Alors que l’on voit aujourd’hui certaines enseignes proposer des pulls en cachemire à 70 ou 90 euros… pour nous ce n’est pas du cachemire. Je vais faire une comparaison parlante, avec le saumon fumé : il y a quarante ans c’était un produit de luxe, que l’on s’offrait pour Noël ou pour un événement exceptionnel. Aujourd’hui on le trouve en plaquettes de quatre tranches pour quelques euros en grandes surfaces. On a l’impression d’avoir démocratisé les choses mais en fait on les a confondues : on a fait se côtoyer sous la même appellation des produits de qualités extrêmement disparates, et une tranche de saumon fumé de grande distribution n’a rien à voir avec une tranche de saumon fumé de traiteur, alors qu’elles ont le même nom. C’est exactement pareil pour le cachemire.

Le lin est une matière capricieuse, parce que selon la façon dont la fibre a été travaillée, elle peut être sèche et rêche ou souple et agréable. Dans tous les cas elle porte lourdement sa réputation de froissabilité, comme toutes les matières naturelles, et quand certains parlent de lin-qui-ne-se-froisse-pas je lève les yeux au ciel parce que c’est impossible. Ce à quoi nous attachons de l’importance c’est le toucher, la souplesse et la durabilité. Je vois passer des liasses de lin sec et rêche, qui ne convient pas à notre clientèle.

Enfin le lyocell (lire en page 97, ndlr) est une matière très intéressante, qui n’a qu’un gros défaut : son nom, qui laisse penser à une matière synthétique, alors que c’est une matière naturelle, qui donne un toucher et un porter très agréables, et une fraîcheur bluffante. Nous l’utilisons en mélange pour vestes et pantalons.

Qui dessine les collections ?

Nous avons des fondamentaux que nous faisons évoluer à la marge : on retouche une pince, une hauteur de pantalon, un bassin… Nous rééditons aussi certains vêtements, que l’on a retrouvés dans nos archives ou chinés à droite ou à gauche ; on peut avoir à changer la matière, ou la largeur de col, ou même le type de boutons… Nous n’avons là aucune prétention de stylisme, c’est surtout le choix des matières et des couleurs qui fait l’identité de la maison. Les boutons aussi, qui sont un point très souvent négligé, à grand tort. Or entre leur taille, leur matière, leur couleur, la façon de les poser sur le vêtement, cela change tout : un vêtement peut être inintéressant avec un bouton et passionnant avec un autre – c’est d’ailleurs ce point qui m’avait le plus fasciné chez Saint-Laurent, où je l’ai constaté de mes yeux. Le bouton n’est pas du tout un accessoire secondaire : il est crucial !

Seul problème : un tel raffinement suppose un sourcing très poussé, donc très prenant…

On passe un temps incroyable en sourcing, et je passe moi-même beaucoup de temps en déplacements pour aller voir des fabricants, des grossistes… Il faut discuter avec eux, expliquer sa démarche, et alors ils t’ouvrent leur cœur et leurs portes. J’ai aujourd’hui des rapports très cordiaux avec des fabricants et des revendeurs de boutons, je passe beaucoup de temps dans leurs réserves, je fouille dans leurs vieux stocks et je trouve des merveilles. Et c’est passionnant à deux titres : d’abord parce que je trouve des boutons que l’on ne trouve pas ailleurs, et surtout parce que ces gens me conseillent, or ils ont un œil extrêmement exercé sur l’impact du bouton. Il faut les écouter parce que ce sont des experts dans leur domaine, et arriver à eux avec des idées arrêtées c’est s’appauvrir et prendre le risque de passer à côté d’une très bonne idée.

S’agit-il de fournisseurs français ou étrangers ?

Je suis un chauvin de compétition, ce qui veut dire que tout ce que je peux faire en France est fait en France, qu’il s’agisse de tissus ou de boutons. Ce que je ne vis pas comme une contrainte, puisque je m’autorise à aller chercher en Angleterre et en Italie, voire en Espagne et au Portugal, si je ne trouve pas de production française. Cela signifie que je ne suis pas maqué avec qui que ce soit, mais en revanche je suis d’une fidélité absolue lorsque l’on travaille bien ensemble. Ce qui me marque aussi, c’est le nombre de fois où j’ai entendu « Ah ça, tu ne peux plus le trouver en France ! » et où je l’ai finalement trouvé… Au bout du compte, 95% de ce que l’on vend est une production CEE, avec un pourcentage de Made in France qui peut varier à la marge d’une année à l’autre, et qui sera plus élevé cette année… »

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OXYMORON

The discreet audacity of his style makes him a sort of oxymoron of the speciality, and is the source of his charm. The spiritual heir to the Arnys style, Berteil’s only equivalent, for all lovers of the genre, is Walker Slater, with its very Scotch style, and Degand, with a much more upmarket positioning. A historical style and a positioning chosen by Vianney Houette, who bought the brand five years ago. For the first time, he explains this, and dissects the house’s codes for Dandy.

If we don’t know if there is a life after dandyism, Vianney Houette shows that there can be one before. After graduating from business school, he took his first professional steps at Yves Saint Laurent in the United States before returning to France to work for eleven years in the retail sector, where he was in charge of marketing before taking charge of international projects, and then for another seven years as secretary general of an insurance group. He remembers his first job as a revelation: “I was captivated by the attention to detail, the quality, the materials, and the importance given to the upstream work, which was not visible. I was very impressed by this.” At the end of his first twenty-year career, the entrepreneur took precedence over the employee, and he began to look for a company to buy. The one he was going to invest in had to meet three criteria: it had to be a company that made high-quality products, had to have a history, and needed to be relaunched. In other words, a “sleeping beauty”. He quickly found it in Berteil, which immediately appealed to him. The company had belonged to the founding family since 1840, had shops in Paris and Deauville, its owners were old enough to retire and no heir wanted to take over. With a small group of shareholders Vianney Houette bought the company in 2016. The house has always respected five fundamentals that remind him of his feelings at YSL twenty years earlier: “Never any concession on materials, never any concession on manufacturing, lots of colour, no fashion, no luxury.”

Dandy: Here are five commandments that need to be explained…

Vianney Houette: “Never make concessions on materials: 80% of the materials offered to me don’t make it past the door. Never make concessions on manufacturing: it would be tempting to have a few small productions done quickly and badly in exotic countries, but we never do that. On the other hand, Catherine, the production manager, and I go to the workshops and factories a lot, to see how the products are made: with what care, what attention, what type of thread, how many stitches per centimetre… A lot of colour because it’s part of our DNA: we’re known for it and we take great pleasure in it. Two specific examples to support my point: we have 35 colours per collection of jumpers and 30 to 35 per collection of velvet trousers. And we sell them, even surprising colours, because we have customers who are keen on colour. Last but not least: no fashion in the sense that what you buy from us has to be wearable for years and therefore has to have a certain timelessness. This doesn’t mean that we don’t look at what’s going on: we’re very interested in trends, in the zeitgeist that we sniff out at Pitti, but we only keep what we think is sustainable. So without any contempt on our part, no fashion in the sense that Berteil does not have to follow fashion, we are free of it. We don’t want style to be imposed, but we want each client to be free to create their own style: it’s up to us to provide them with the pieces to do this. Finally, the last point: no luxury, which is a bit of a dirty word because we don’t really know what it means. The price of our products reflects the care that has been taken in their manufacture and the quality of their materials, and the customer does not pay for the Berteil brand, which is just there to reassure. We work hard on prices so that as many people as possible can dress well on a decent budget.

It’s true that when you see images of Berteil looks in the press, and in Dandy in particular, you think that it must be quite expensive; but when you go to the shop you realise that everything is quite accessible: jackets, waistcoats, trousers…

I’m delighted that this is apparent, because it’s a considerable effort. There is a trend at the moment which consists of saying “Buy less but buy better” and we can see that: don’t buy any more three jackets but one nice one, and the same for trousers, waistcoats, coats…

Who is the Berteil customer?

There is not one typical profile but several tribes, which I have called Classic-chic, Dandy and Discoverers. The classic-chic is a 55-year-old man who doesn’t buy to buy: he comes regularly to buy beautiful pieces, which he looks after and keeps, so he wants them to be timeless. The dandy comes to us for pieces that he cannot find elsewhere and is very keen on customisation. Finally, a relatively recent clientele: the tribe of discoverers, who are between 30 and 45 years old, are starting to develop a taste for dressing and need a little guidance, even if they know what they want. These are people who come to us because they know they can touch the fabrics, ask questions, and are always welcome. I don’t worry about those people who don’t buy anything because I know they’ll come back, ask more questions, come back again, and they’ll end up making an informed purchase.

As you just said, fabrics are one of the strongest characteristics of Berteil’s DNA, for their intrinsic qualities and for their colours. How do you select them?
What changes everything for us is that we have set up an in-house workshop that gives us the capacity to produce, because this avoids me having to go through the forks of manufacturers who would impose on me to go through their fabric suppliers or their models. As soon as you have your own workshop, you can buy your fabrics from whoever you want and you have access to a much wider range of manufacturers. To answer your question precisely, we work with cotton, wool, lycolin (a mixture of lyocell, linen and cotton), cotton, cashmere, and two materials for which we are renowned, our favourite materials, which are tweed and whipcord. I have a passion for tweed, I think we have more than a hundred different ones today. Tweed is more of a philosophy than a product, and it’s a great material, which our customers are very keen on, and they come to us looking for something a bit original – we can even design an exclusive tweed ourselves. Between the different thicknesses, the background weave, the number of lines, the number of colours, the origin from Ireland, England or Germany, the possibilities are endless…

Cotton is a complicated market, where there are beautiful fabrics and others that have no hold and no interest. We are therefore very demanding and we work very well with English cottons, but I wouldn’t go into the origin of their fibre – between Egypt, India, the United States and China it’s complicated: what interests me is the transformed material, and we have found manufacturers who make us wonderful twills, light cottons to make safari jackets, heavy cottons to make jackets…

I have a problem with cashmere because the term has been so overused that it is difficult to understand today. If you want a beautiful cashmere, you have to take it from a goat that has been cold – that is to say, that has lived at altitude – because if it hasn’t been cold, it hasn’t developed the fleece that interests us, which comes from the animal’s chest. Then, if we want to do things correctly, the cashmere must be dyed when it is a hair and not later: if it is dyed once it is spun, it dyes the fibre – which is much more complicated because it means deciding in advance how much thread we are going to use in one colour or another. Then there is knitting, which we do on old hydraulic machines, because they give an infinitely softer result than modern machines, which are electric. If we respect all this, in the end we have a wonderful material which will improve with time, becoming softer and smoother. Whereas today we see certain brands offering cashmere jumpers at 70 or 90 euros… for us it’s not cashmere. I’ll make a telling comparison with smoked salmon: forty years ago it was a luxury product, which was offered for Christmas or for an exceptional event. Today, it can be found in packs of four slices for a few euros in supermarkets. We have the impression that we have democratised things, but in fact we have confused them: products of extremely disparate qualities have been brought together under the same name, and a slice of smoked salmon from a supermarket has nothing to do with a slice of smoked salmon from a delicatessen, even though they have the same name. It’s exactly the same with cashmere.

Linen is a fickle material, because depending on how the fibre has been processed, it can be dry and rough or soft and pleasant. In any case it carries a heavy reputation for creasing, as do all natural materials, and when some people talk about linen that doesn’t crease, I roll my eyes because it’s impossible. What we value is the feel, the softness and the durability. I see bundles of dry, rough linen passing by, which is not suitable for our customers.

Finally, lyocell (see page 97, editor’s note) is a very interesting material, which has only one major flaw: its name, which makes you think of a synthetic material, whereas it is a natural material that feels good to the touch and to the touch, and is surprisingly fresh. We use it as a blend for jackets and trousers.

Who designs the collections?

We have some basics that we change from time to time: we alter a clip, a trouser height, a waistband… We also re-edit certain garments that we have found in our archives or that we have found on the market; we may have to change the material, or the width of the collar, or the same type of buttons… We have no stylistic pretensions here, it is above all the choice of materials and colours that gives the house its identity. Buttons are also a point that is often neglected, to a great extent. But their size, material, colour and the way they are placed on the garment change everything: a garment can be uninteresting with one button and exciting with another – this is the point that fascinated me most at Saint-Laurent, where I saw it with my own eyes. The button is not a secondary accessory at all: it is crucial!

The only problem is that such refinement implies very thorough sourcing, which is very time consuming…

We spend an incredible amount of time sourcing, and I myself spend a lot of time travelling to see manufacturers, wholesalers… You have to talk to them, explain your approach, and then they open their hearts and their doors to you. Today I have a very cordial relationship with button manufacturers and retailers, I spend a lot of time in their stockrooms, I rummage through their old stocks and I find marvels. And it’s exciting for two reasons: firstly because I find buttons that you can’t find anywhere else, and above all because these people advise me, and they have an extremely keen eye for the impact of the button. You have to listen to them because they are experts in their field, and to come to them with fixed ideas is to be impoverished and run the risk of missing out on a very good idea.

Are they French or foreign suppliers?

I’m a competitive chauvinist, which means that everything I can make in France is made in France, whether it’s fabrics or buttons. I don’t see this as a constraint, because I allow myself to go and look in England and Italy, or even in Spain and Portugal, if I can’t find any French production. This means that I am not tied to anyone, but on the other hand I am absolutely loyal when we work well together. What also stands out for me is the number of times I’ve heard “Oh, you can’t find it in France any more!” At the end of the day, 95% of what we sell is an EEC production, with a percentage of Made in France that can vary from one year to the next, and which will be higher this year…”