Nouvelle-Zélande : sur la terre des kiwis, des hobbits et du Aka
Depuis le phénoménal succès du Seigneur des Anneaux et du Hobbit, la Nouvelle Zélande voit déferler chaque année des millions de curieux friands de découvrir un territoire aux paysages sublimes aux antipodes de l’Europe. Mais ce pays n’est pas seulement un décor de carte postale décliné dans des films à gros budget, c’est aussi et surtout une terre multiple, riche de sa culture Maori, de ses mélanges de populations qui se partagent entre l’île Nord et celle du Sud, de ses légendes, de son développement économique et de ses All Blacks, maîtres du Rugby mondial.
Par curiosité nous avons voulu en voir au moins un… tant il nous paraissait évident que dans un pays où les habitants portent son nom, il serait partout. En fait nous en avons vu beaucoup, certains empaillés et d’autres, plus nombreux, objets de souvenirs et de bimbeloterie. Le Kiwi, car il s’agit de cet oiseau bien sûr, est sur toutes les lèvres, dans presque toutes les phrases à Aotearoa, le pays du long nuage blanc. Mais d’animal, point. Le voyage fut pourtant sinueux et à chaque fois que quelqu’un nous avouait qu’il était un Kiwi nous cherchions ses plumes et son long bec… En arrivant à Kirikiri tout au bout de l’île du nord appelée « The Bay of islands », le paysage nous parut familier avec sa lande pierreuse bordant une mer turquoise irisée par la lumière d’un soleil couchant : un coin de Bretagne perdu en Océanie ? C’est sur ce territoire étroit qui pointe comme un doigt entre la mer de Tasmanie et l’Océan Pacifique, qu’est née la nation Kiwi. Premier contact, première émotion avec un paysage d’une incroyable luminosité, aménagé par David Harman en un superbe parcourt de golf pour le Kauri Cliffs, un Relais et Château posé sur une élégante colline dominant l’Océan. Repos et confort dans un établissement qui sait recevoir ses hôtes et propose une cuisine où les mets asiatiques se conjuguent avec gastronomie. Dans cette côte Est, en traversant cet immense domaine propriété de Sir Robinson, un richissime Kiwi, les arbres sont de couleurs mordorée et l’écorce des cèdres centenaires, rouge. La route, où s’égaillent des moutons, descend lentement vers une plage privée magnifique. La brise du large pousse les vagues loin sur le rivage, là encore des images du Finistère, avec ses galets noirs et brillants amoncelés sur la grève, nous reviennent en mémoire. Malgré l’automne qui s’annonce le temps reste doux. Le village et ses habitations n’ont rien d’original, en revanche de gauche et de droite des vignes indiquent que dans la région le vin est roi, notamment le Pinot Noir devenu en quelques années le cépage préféré des Néo-Zélandais, mais aussi un excellent Sauvignon blanc fruité, un Chambourcin et un Tempranillo au goût surprenant. Découvertes depuis un petit monomoteur, les splendeurs échancrées du littoral assailli par le ressac offrent une vue exceptionnelle à 180 degrés. A gauche le Cap Reinga et son vieux phare restauré indiquent l’endroit où les premiers Maori ont débarqué et implanté les bases de leur culture et de leurs croyances. Plus loin d’incroyables dunes de sable introduisent un improbable désert dans cette partie du monde. Certains y pratiquent un surf insolite. Puis ce sont des forêts de Kauri, l’arbre mythique de Matauri bay, avant de survoler Cap Brett et une myriade d’îlots scintillants. Epoustouflant. A l’atterrissage notre chauffeur de Black Robin Transport nous ramène pour passer la nuit dans notre suite avec cheminée. Le ciel est plein d’étoiles et malgré le jour qui décline nous pouvons distinguer les Cavalli Islands depuis la véranda. Le lendemain l’arrivée sur Auckland est pluvieuse. Cette ville, la plus vaste du pays, s’est développée entre deux ports d’une manière très artistique et moderne. L’espace est fluide et les avenues hérissées de cafés, de boutiques en tous genres, de librairies et de galeries d’art, donnent envie de flâner dans ses allées pour déguster un syrah, goûter sur le pouce des huîtres à l’excellent Depot ou dîner au Sugar-Club, le restaurant sélect situé au 53ème étage de la Sky Tower face à l’excellent hôtel Sky City, ou encore à la brasserie Ostro grouillant de jeunes et de happy few souvent revenus d’un défilé de mode tout à côté, ou après avoir visionné un match de rugby sur un écran géant affalés sur d’énormes poufs gonflables… Comme celui de Ponsonby road, le quartier Britomart est un concentré d’adresses tendance. Du port nous prenons place sur un ferry à destination de Waiheke Island. Quarante minutes plus tard, à Matiatia wharf on se croirait sur un îlot entre Seattle et Vancouver. Tout est clean et coloré et la faune ressemble à celle de Saint- Barth ou de Gstaad. Ici le nanti est chez lui et les badpackers ne font que du lèche-vitrines. Des villas très modernes, qui valent des millions de dollars, affichent leur luxe insolent face à l’océan. En chemin nous rencontrons un kiwi d’origine française, qui a développé le domaine viticole FHE et se révèle fier de son nouvel Eden et des passionnés de grand large qui ont jeté l’ancre dans cette partie du globe pour son calme et sa beauté préservée. Retour à Auckland avant une envolée pour Roturoa, le centre géothermal de la culture Maori.
Là tout est surprenant, d’abord l’incroyable resort Treetops Lodge and Estate avec son manoir aux suites dignes d’un film hollywoodien et ses 2500 hectares de bois et forêts, où les riches et célèbres comme Robert Redford – un habitué – viennent faire des safaris et tirer, pour le trophée, des cerfs magnifiques dans un décor à la Murnau… A quelques encablures Te Puia, où des geysers centenaires, comme le Pohutu, continuent à cracher leurs fumerolles soufrées et à faire trembler la terre. Ici bat le coeur des tribus Maori, ici où une école perpétue les traditions, notamment la sculpture des totems et des objets de bois, d’os et de pierre. Le soir un spectacle décline pour les touristes les traditions ancestrales et le fameux Aka à la langue bien pendue. On comprend que le Maori est intégré à la société Kiwi, qu’il en est l’un des éléments essentiels, contrairement aux Aborigènes d’Australie, et qu’il contribue à son rayonnement.
Toujours pas de Kiwi à plumes, nous poursuivons donc notre route vers Wellington, dernière étape avant l’île du sud. Cette capitale pleine d’énergie est minuscule mais regorge d’intérêts : un superbe théâtre aux affiches alléchantes, des galeries d’art à profusion et un quartier latin qui porte bien son nom : Cuba Street, spot de toutes les tentations culinaires, vestimentaires, artistiques et autres convoitises… C’est à Wellington que des studios ont été créés pour suivre le boom de l’industrie du cinéma en Nouvelle Zélande, et que le Symphony Orchestra ainsi que le ballet Royal sont installés. Bâtie autour d’un immense port protégé du vent, Wellington est une cité cosmopolite et élégante, « la petite capitale la plus cool du Monde » selon Lonely Planet, qualité que nous avons constatée grâce à la chaleureuse bienveillance de ses habitants. Déjeuner ou dîner au Whitebait ou au très couru Charmey Noble est un must avant de découvrir, à environ vingt minutes de 4×4, Boomrock, un endroit hors norme où l’Irlandais du Taxi mauve a rendez-vous avec la lune. La splendeur du paysage serre la gorge et lorsque le regard se pose sur un îlot lointain c’est pour apprendre qu’il s’agit d’un sanctuaire protégé d’oiseaux rares… et de kiwis. Une séance de balltrap face à la mer, quelques puts sur un green sautillant de collines en vallées, et l’appétit s’ouvre sur le succulent repas concocté par le chef de ce lodge simple mais classieux. En revenant sur Wellington nous achetons quelques pots de miel de Manucka, fierté des kiwis, dans l’un de ces marchés bio qui ont fleuri en centre-ville, et mettons nos pas dans ceux d’un guide du Te Papa Tongarewa, musée à la scénographie pédagogique ou le « Maorisme » est expliqué, disséqué dans toute son histoire notamment à travers le fameux traité de Waitangi qui accorde grâce aux premiers autochtones.
L’approche de l’île sud et de ses légendes accrochées aux images de la trilogie de Tolkien revisitée par Peter Jackson, nous donne des frissons. Queenstown est annoncé par l’hôtesse. Sur le tarmac nous attend une Jeep de la Nomad Safaris, un T.O parmi beaucoup d’autres qui profitent de la manne du génial réalisateur. Un large tour des côtes escarpées du lac Wakatipu et des montagnes environnantes dont les lignes brisées font penser à quelques stations de sport d’hiver, la traversée d’une rivière autrefois draguée par les chercheurs d’or où certaines scènes du Seigneur des anneaux ont été tournées, quelques ravins abyssaux où notre chauffeur rejoue le salaire de la peur, des crêtes parfois blanchies par la neige… Glenorchy mais toujours pas de kiwis à plume ! A Queenstown lové autour de son lac, les bâtiments en verre et en bois donnent, eux aussi, l’impression de circuler dans un village de montagne. Chic et charmante, la cité ne cesse de grandir avec l’arrivée d’émigrants séduits par la grâce de l’endroit et de son environnement oxygéné. Ce soir-là nous dinons au Botswana Butchery, sans doute le meilleur restaurant de la ville pour sa cuisine et l’excellence de son service. Vers six heures du matin et alors que l’aube commence à rosir l’horizon, nous survolons la région de Milford : lacs, forêts, cascades et pitons rocheux nous émerveillent, et lorsque nous empruntons un bateau pour traverser le Fjord, des dauphins en goguette nous accompagnent. La ballade est un enchantement et sera le point final d’une évasion magique au pays des kiwis… dont nous n’avons pas vu les plumes !
Un grand merci à Barbara Sablon qui a permis la réalisation de ce reportage.