Nouveau Range Rover : Un peu plus près des étoiles
On ne roule pas en Range Rover comme on roule en X5 ou en Cayenne. Si le choix d’un 4×4 participe d’une certaine recherche de sérénité (position surélevée, sécurité active et passive…), celui d’un Range s’en distingue par celle d’un art de vivre. On peut hésiter entre un X5 et un ML, un Cayenne ou un Q7. Le Range est à part. Il évolue dans une autre dimension et véhicule une autre image. Rapporté à l’automobile, on pourrait dire qu’il s’agit plus d’une Jaguar XJ ou d’une Bentley Flying Spur que d’une Audi A8 ou une Mercedes S. Ici l’esprit, l’atmosphère – l’indicible donc – priment sur la performance. Ici la vitesse maxi et les chiffres d’accélération deviennent accessoires. Choisir de rouler en Range Rover, c’est affirmer une manière de vivre, une élégance, et les assumer. Car on paye ce choix de tarifs pas spécialement amicaux, d’un comportement routier qui n’incite pas à l’exubérance et de consommations affolantes. Mais je devrais dire « on payait ce choix… » car la quatrième génération s’affranchit de deux de ces points faibles sur trois.
LE MÊME, EN MIEUX
Pas question de toucher à la ligne caractéristique du véhicule, célèbre dans le monde entier, sans laquelle un Range ne serait plus tout à fait un Range. Les stylistes britanniques ont donc conservé les grandes lignes de celle-ci, affiné sa proue et sa partie arrière. On retrouve ainsi l’encombrement de son aîné, son altitude au-dessus de la mêlée et son volume intérieur généreux. A l’intérieur la nouvelle planche de bord emprunte à la précédente et au petit frère Evoque. L’équipement est complet, l’ergonomie intuitive et les finitions soignées. L’abondance de cuir et de bois exhale un agréable parfum de luxe (une remarque qui nous change agréablement de la critique trop régulièrement formulée dans ces colonnes dénonçant des tableaux de bord en plastique sur des voitures prétendument haut de gamme), l’espace et le toit vitré panoramique participent de cette impression, ainsi que le confort des sièges, véritables « commodités de la conversation » nomades. Avec ses sièges arrière individuels (banquette 3 places sur les autres modèles), la version Autobiography joue à fond l’ambiance limousine. Unique dans la catégorie.
LA ROLLS DES 4X4
Dans cette version supérieure, le Range justifie plus que jamais son image de « Rolls des 4×4 » : espace aux jambes remarquable (12 cm de mieux que la génération précédente), écrans vidéo dans les appuis-tête, console centrale en bois vernis avec réglages individuels de position et de climatisation, tablettes de travail, le tout baigné dans la lumière tamisée du toit vitré panoramique surteinté : difficile de demander plus. Même traitement royal aux places avant, où dernières technologies et tradition sont étroitement liées : cuirs fins, bois précieux et alu brossé aux ajustages irréprochables, mais aussi afficheurs entièrement digitaux, sièges chauffants, rafraîchissants et massants, système hifi Meridian 825 W… Le Range cultive par ailleurs une autre qualité déterminante pour le confort : l’insonorisation. Déjà soignée jusqu’à présent, elle est encore améliorée, grâce notamment à de nouveaux vitrages feuilletés.
TROIS MOTORISATIONS
Cependant, pour flatteuse que soit cette débauche de luxe, c’est dans la partie cachée de l’auto qu’il faut chercher ce qui fera définitivement la différence entre cette quatrième génération et les précédentes. En adoptant une structure monocoque en aluminium inspirée par celle de la Jaguar XJ, le Range s’est en effet offert un régime minceur de 420 kg, excusez du peu… Résultat des courses : un comportement routier amélioré (poids allégé + nouvelles suspensions pneumatiques = moins de roulis) et surtout des consommations nettement revues à la baisse. On en rêvait, Land Rover l’a fait. Enfin, serait-on tenté d’ajouter, tant il est vrai que son insatiable appétit a toujours été le principal point faible du Range. Je veux parler du Range essence, celui des puristes, avec lequel même avec le pied très léger il était jusqu’ici difficile de descendre en dessous de la quinzaine de litres sur autoroute à vitesse règlementaire, et de la vingtaine en ville. Débarrassé de son embonpoint, le voici enfin raisonnable – sans pourtant devenir frugal, pour cela il faudra attendre la version hybride, prévue d’ici deux ans – de ce point de vue. Les inconditionnels de l’essence retrouveront avec bonheur le V8 compressé de 510 ch, emprunté aux Jaguar XFR, XJ et XKR, souple, puissant et remarquablement sobre, qui assure à la voiture des performances de tout premier plan : 250 km/h et 5,4 secondes au 0 à 100 km/h – mieux qu’une Porsche Boxster ! Les dieselophiles disposent quant à eux de deux choix : le V8 4,4 litres déjà connu (mais porté à 339 ch) et un nouveau V6 3.0 litres, développant 256 chevaux. Land Rover annonce avoir encore amélioré le contrôle des vibrations, pourtant déjà de bon niveau sur le précédent TDV8.
SOUVERAIN
A condition de ne pas être brusqué, le Range Rover a toujours brillé par un comportement façon force tranquille. La nouvelle génération annonce un meilleur ressenti au volant, que nous espérons pouvoir vérifier prochainement, mais que l’allègement et les nouvelles liaisons au sol permettent bien d’escompter. Et puis il y a les aptitudes au tout-terrain. Même si moins de 5% des utilisateurs s’éloignent de l’asphalte, l’expérience permet à votre serviteur d’affirmer qu’en cas d’adhérence très dégradée (neige abondante ou glace), la qualités du Range s’avèrent époustouflantes et lui permettent de continuer à circuler là où les SUV, tous les SUV, déclarent forfait. On ne remporte pas le Paris-Dakar par hasard…
1970-2012 : 4 GÉNÉRATIONS
1970-1995
Land Rover crée l’événement en 1970 en lançant le premier 4x 4 doté des qualités routières d’une berline. Polyvalent, le premier Range est aussi luxueux et s’impose d’emblée au sein de la jet-set. Lancée en 1993, la première version Vogue pose définitivement le Range Rover comme le premier 4×4 de luxe.
1995-2001
Ce n’est qu’au bout de 25 ans d’un règne sans partage que Land Rover osera revoir sa copie et présenter un nouveau Range. La génération P38A perd en grâce esthétique mais pousse plus avant les caractéristiques de luxe et de confort du Range LSE, ultime version de la première génération. Ses concurrents directs ne sont plus les autres 4×4 mais les berlines de prestige.
2002-2012
Conçue pour être motorisée par le V8 BMW, marque à laquelle Land Rover appartient alors, la génération L322 impose de nouveaux standards à la spécialité, tant par la majesté de ses lignes que par son agencement intérieur, qui doit autant à la décoration domestique qu’à l’automobile. Racheté par Ford, le Range troquera bientôt les mécaniques BMW pour des blocs Jaguar. Sur un marché désormais concurrentiel, il remet les pendules à l’heure et reprend de la hauteur, mais au prix d’un poids devenu pénalisant.
2013
Baptisée L405, la quatrième génération repousse très logiquement les limites de ses aînées plus loin que jamais. Plus luxueux, plus confortable et plus performant, le nouveau Range est surtout (beaucoup) plus léger, ce qui doit lui permettre d’être (sensiblement) plus sobre. Ce qui ne le rendra que plus désirable.
En adoptant la structure aluminium, Land Rover vient d’accomplir un pas de géant dans l’histoire du Range Rover. Le 4×4 le plus chic du monde devient aussi l’un des plus choc – même si sa propension à faire vivre et apprécier la route aux vitesses règlementaires est loin d’être la moindre de ses qualités. En n’incitant pas à la vitesse et en privilégiant le bien-être à son bord, il est aussi extrêmement actuel, et on ne peut guère plus lui trouver qu’un défaut, mais il est de taille : son prix, plus que jamais à la hauteur de Son Altesse. Et attention, vous êtes prévenu : lorsque vous l’aurez essayé, vous n’en voudrez plus d’autre…