La note verte
Il y a la peinture aussi qui enrichit les mots du parfumeur, on parle de notes vertes, de création figurative ou impressionniste ! Cette fois-ci, c’est la littérature que côtoie la parfumerie. Oh, il y a bien eu Balzac, Huysmans, ou autres Süskind avec son roman « le Parfum » en 1985. Il y a aussi beaucoup de parfumeurs qui ont pris la plume pour parler de leur métier, de leur art.
Cette fois-ci, un parfumeur, au style alerte et reconnu s’essaie dans le registre romanesque. Dans « la Note Verte », Jean-Claude Ellena ne s’éloigne pas de son milieu pour raconter l’histoire d’un nez confirmé qui, après une belle et longue carrière, est confronté à ,bien sûr, une nouvelle génération, illustrée par un parfumeur jeune, talentueux et ouvertement ambitieux. C’est une description de ce monde de la création olfactive, avec ses codes, ses modes de fonctionnement qui, finalement, est assez méconnu du grand public. Même si on ne peut pas parler d’autobiographie, ce roman est certainement largement inspiré de beaucoup de situations vécues par Jean-Claude Ellena. Avec la Note Verte, l’auteur nous montre la parfumerie moderne où la recherche analytique et le marketing prennent le pouvoir sur l’intuition et la création. Le lecteur sera plongé dans les rendez-vous avec les clients, les réunions avec les chefs de projets et même dans le laboratoire pour finaliser le dernier essai du futur parfum à succès. Il en ressort aussi une part encore plus personnelle quand Jean Claude Ellena évoque les rendez-vous de son personnage avec un de ses clients, en l’occurrence un sellier italien. L’auteur nous offre un intéressant voyage olfactif dans les caves à cuir, où il est question de tannage végétal ou de Cuir de Russie. Il faut dire que Jean-Claude Ellena est depuis 2004, le parfumeur exclusif de la maison Hermès et que cette découverte des cuirs est vraisemblablement autobiographique.
Pour avoir travaillé avec Jean-Claude Ellena, lorsque j’étais élève parfumeur, je me suis peut-être trop concentrée à essayer de trouver les personnages ou situations réels qui se cachent derrière la fiction, au détriment de l’histoire en elle-même, qui se retrouve alors au second plan. J’ai aimé Blanche, la compagne d’une vie, à la fois si discrète à coté de son créateur de mari et pourtant si présente par sa culture et son ouverture sur le monde. Le conte pour enfant qu’elle achève où il est question d’Antonio, le colporteur d’odeurs est charmant! Ce roman, d’opposition oserais-je dire, tant la tranquillité méridionale du vieux parfumeur se frotte au parisianisme de la nouvelle génération, a le mérite de décrire un métier en pleine mutation et, qui plus est, par un des parfumeurs les plus talentueux de notre époque.
La Note Verte
Jean-Claude Ellena
Edition : Sabine Wiespieser Editeur