Les shoe freaks le savent : il y a chaussure et chaussure. Comprenez le mass market, destiné au plus grand nombre, constitué pour l’essentiel de modèles sans personnalité, industriels et interchangeables, et pour une petite minorité de souliers fabriqués dans les règles de l’art, avec de belles peaux et des exigences de qualité de fabrication élevées. Et au sein de cette minorité un petit cercle, plus infime encore, occupé par une vingtaine de maisons qui perpétuent un savoir-faire patrimonial et font le bonheur des vrais connaisseurs. Celles-ci constituent le terrain de jeu de notre confrère Pointure et de quelques officines spécialisées comme Upper Shoes, qui se fait un devoir de ne proposer qu’une sélection de modèles effectuée avec soin et dans un souci d’exclusivité. Elle nous présente ici ses modèles de printemps.

Elégance décontractée

A tout seigneur tout honneur : focus d’abord sur les tout derniers modèles Pierre Corthay, qui décline pour Upper Shoes trois versions pointues de trois de ses modèles prêts à porter : le richelieu Wilfrid, le derby Arca et le mocassin Bel Air.

Deux séries limitées Corthay pour Upper Shoes : le derby deux oeillets Pullman et le mocassin Bel Air monté sur une semelle ultralégère Airlite.

Le premier se voit ici proposé dans une version bimatière conjuguant avec bonheur élégance et décontraction. Nous découvrons un richelieu empeigne unie monté sur une forme à bout fluide caractérisé par ses oreilles de quartier en toile Denim. Pas n’importe quelle toile, puisque celle-ci provient du fournisseur japonais de la maison, un choix que comprendront les amateurs de jeans qui ont adopté le made in Japan pour leurs modèles les plus tendance. Corthay associe ici cette toile sport à un patronage Balmoral fantaisie l’habillant à une empeigne de calf bleu nuit.

Plus classique, le derby Arca Pullman utilise une forme à monter dérivée de la forme à bout carré et flancs marqués Arca, elle-même inspirée de la forme mesure Sergio, dont elle se distingue par un chaussant plus généreux auquel elle doit son nom de Pullman. Très typé, ce modèle se distingue par un patronage derby deux oeillets qui dégage largement l’empeigne unie et le pincé main qui caractérise son bout. Il est proposé ici dans une édition exclusive marron relevée de lacets et de passepoils de bords francs rouges.

Enfin, le mocassin à plateau Bel Air lancé il y a un an est proposé rue Caumartin dans une version en calf antique couleur vieux bois monté sur une semelle airlite ultralégère et confortable.

Comme Clooney et Dujardin

Mocassin en cuir tressé marron Santoni, montage Blake.

Fantastique coup de pub pour le mocassin tressé Santoni découvert à la télévision dans la pub Nespresso mettant en scène George Clooney et Jean Dujardin. Difficile de faire plus fort ! Comme à l’écran, le modèle distribué par Upper Shoes est en cuir tressé marron, et monté en Blake sur une semelle légère, pour privilégier un confort à l’italienne.

Spécial Hipsters

Universellement célèbre pour son tassel loafer, le fabricant américain est connu pour sa stratégie commerciale originale qui repose sur les collections dédiées qu’il fabrique pour ses principaux détaillants parallèlement à la production de ses quelques modèles best sellers. Pour Upper Shoes, la maison du Massachusetts a développé deux bottines sport en veau-velours marron moyen (« snuff suede » : littéralement veau-velours tabac). L’intérêt de la première, à bout droit fleuri rapporté, tient à l’équilibre entre son patronage très sport – derby à cinq oeillets métalliques et quatre crochets – et la qualité de fabrication soignée révélée par l’utilisation d’une peau de qualité supérieure et des finitions minutieuses – perforations décoratives encadrées de doubles rangs de coutures petit point, passepoil cuir ton sur ton…
Plus sport encore, la seconde conserve les mêmes passepoils contrastés ton sur ton qui soulignent sa fabrication soignée mais arbore une empeigne unie, des finitions plus simples mais des lacets rubans qui, associés au patronage à oeillets et crochets métalliques, lui donnent une allure originale et très personnelle de work shoe luxueuse.
Les connaisseurs relèveront son travail de semelle, caractéristique d’Alden avec son insert cuir monté sur une semelle de crêpe cousue.

Deux modèles qu’Upper Shoes a voulus pour les hipsters qui constituent une partie de sa clientèle – « une clientèle qui compte beaucoup de personnes très lookées qui arrivent avec des barbes de trente centimètres, nous précise Xavier Candat, auxquelles ces modèles conviennent parfaitement en raison de leur aspect sport, presque militaire, et décontracté ».

Deux fabrications exclusives Alden pour Upper Shoes. On apprécie l’esprit work shoe de luxe du modèle empeigne unie : définitivement hipster.

Elles gagnent à être connues

Deux créations Carmina.

Veau-velours encore, mais traité de façon nettement plus civile et habillée, pour le richelieu et la chukka boot Carmina. Xavier Candat et Vincent Chauvin tenaient à travailler avec ce fabricant espagnol méconnu dans l’Hexagone du fait d’une représentation confidentielle (une seule boutique, avenue de l’Opéra à Paris), malgré une qualité de fabrication qui lui permet de supporter sans rougir la comparaison avec les grands noms de la spécialité. Sans erreur ils ont choisi la forme la plus tendance, la Rain à bout carré atténué et étroitisé, qui sert ici un richelieu bout golf classique en veau-velours marron très foncé et une desert boot. Il convient de souligner le rapport qualité/prix du premier, qui bénéficie pour moins de 400 euros d’un montage de grande qualité, et le caractère habillé qu’offrent au bottillon son élégante forme à monter, sa belle peausserie et sa fabrication soignée. Une maison qui gagne à être connue – « Je suis allé à Majorque plusieurs fois, et la qualité de fabrication et le soin apporté aux finitions sont juste incroyables » confie Xavier Candat. Précisons qu’une collaboration importante (cordovan et peausseries exclusives) est prévue pour l’été prochain entre la boutique Upper Shoes et le fabricant, l’implantation de Carmina à Paris étant décevante et son directeur général José Albaladejo trouvant avec Upper Shoes un point de vente de référence auprès d’une clientèle pointue.

L’exclusivité du cuir de bison

Deux modèles Rancourt, dont la bottine en cuir de bison, un véritable collector

Forte personnalité, sur un registre très sport, pour les créations de l’Américain Rancourt. Située à quelques kilomètres du lac Sebago, la marque personnifie mieux qu’aucune autre l’esprit de la région du Maine, entre authenticité et rusticité. Entre cousu indien, peaux rustiques et solidité réputée, le caractère traditionnel de ses modèles a permis à Rancourt de se bâtir une réputation enviable en une dizaine d’années. Le modèle fort de ce printemps est la bottine en cuir de bison, une peau rustique s’il en est, à gros grain, très épaisse (entre 3 et 5 mm !) et néanmoins très souple, ce qui permet au pied de s’installer très vite, offrant un confort de port incroyable pour une peau aussi sport. La ressemblance avec le fameux cuir de Russie retrouvé il y a une demi-douzaine d’années après un séjour prolongé au fond de la mer, qui a donné lieu à quelques dizaines de chaussures de collection fabriquées par un bottier britannique, est un avantage supplémentaire. Comme toutes les productions Rancourt, la bottine en cuir de bison est entièrement cousue main. Un modèle éminemment représentatif de la région du Maine à côté duquel Upper Shoes ne pouvait pas passer, ne serait-ce que pour satisfaire ceux de ses clients toujours à la recherche d’une façon de marcher différente.