Ermenegildo Zegna : cent ans d’exigence
Une manifestation qui permettra aux visiteurs de découvrir ce qu’il convient bien d’appeler l’univers Zegna, que l’on aura l’occasion de découvrir dans le détail depuis
les origines, avec l’atelier de tissage pour lequel Ermenegildo Zegna a refusé dès le premier jour tout compromis, afin de ne produire que des tissus de la meilleure qualité possible, jusqu’à nos jours. L’exposition de nombreuses photographies, de tissus et de tenues – jusqu’à celles de E. Zegna lui-même – et la projection de films permettent de prendre la mesure de l’entreprise qui, de petite pme artisanale, est devenue en un siècle une marque internationale dirigée par Gildo et Paolo (respectivement DG et président), représentants de la quatrième génération. Ermenegildo Zegna compte aujourd’hui 555 magasins dans 80 pays et emploie 7000 personnes.
Pour personnaliser l’expo Aldo et Angelo, représentants de la troisième génération, qui ont repris l’affaire après la guerre pour l’amener là où elle est aujourd’hui en lançant le prêt-à-porter en 1968, puis la mesure quatre ans plus tard, ont choisi de commenter une sélection d’images représentant les trois lieux préférés du créateur de l’empire : sa maison, son atelier de tissage et « ses » montagnes.
Mettre l’accent sur la qualité des tissus
Si le nom d’Ermenegildo Zegna est aujourd’hui mondialement connu, au même titre que ceux des autres marques de couture premium, seuls ceux qui s’intéressent vraiment à la spécialité savent la qualité des matières et celle des finitions que Zegna s’impose.
Une installation met les visiteurs dans l’ambiance du tissage et permet de se représenter le cycle de production complet, depuis les matériaux bruts jusqu’aux tissus finis, clé de voûte de la création de la marque. Trois photographes de renom illustrent cette partie, complétée par une représentation des métiers à tisser par un collectif d’artistes de Cittadelarte tandis qu’un film illustre la signification du nombre symbolique 500, nombre de mains nécessaire à la confection d’un costume Zegna sur mesures. Et pour fixer les idées, une sélection de tissus incroyablement doux au toucher et légers témoignent de la quête d’innovation permanente de la maison.
Les costumes exposés sont présentés par décennie, conviant le visiteur à un voyage dans le temps de la mode et de l’excellence, des années 70 à nos jours. Ils soulignent l’évolution des goûts, des tendances et des proportions à travers des pièces classiques d’abord, puis la collection sport puis l’avènement d’un style plus décontracté dans le courant des deux décennies suivantes ; autant de signaux explicites d’une société en évolution rapide. Mises bout à bout, des tenues représentent le fil du classicisme et de l’élégance finalement intemporelle du style Zegna
Enfin, des séries photo réalisées par les grands photographes de mode internationaux et les campagnes de publicité marquant ces quarante ans de création masculine de haut niveau, complètent l’ensemble.
Dans le détail
Les tissus, clé de voûte de la réputation
Les quelques deux millions de mètres carrés de tissu que produit chaque année la filature Zegna servent essentiellement à la production maison mais alimentent également les meilleurs labels de prêt-à-porter et les meilleurs couturiers du monde entier. Dès 1963 la maison italienne s’est attachée à se garantir la disposition des meilleures fibres possibles en créant le Wool Trophy d’abord, premier du genre qui allait donner lieu par la suite à d’autres concours de haute volée (celui de Loro Piana notamment), puis le Mohair Trophy et le Cashmere Trophy.
Cet approvisionnement en fibres naturelles de la plus haute qualité possible a permis à l’atelier de développer un mérinos super-fin titrant 1/120, des mélanges coton et cachemire sans équivalent, un tissu anti-tâches issu des nanotechnologies, un autre s’adaptant aux changements de climat, un autre encore reflétant les rayons du soleil, réduisant la température du corps de jusque dix degrés, une vigogne peignée superfine, un pur cachemire coloré à la teinture biologique… plus qu’un atelier de tissage, la filature Ermenegildo Zegna est un véritable laboratoire consacré aux plus beaux tissus. Pour fêter dignement son centenaire, la maison lance une laine d’une finesse exceptionnelle, mélange des toisons gagnantes des trois dernières éditions de son trophée Toison d’Or, qui affiche la valeur record de 11,1 microns. A titre de comparaison, le plus fin des tweeds écossais fait 35 microns, et un cheveu humain entre 50 et 60 microns. Il y a bien longtemps que la maison s’est fait une tradition de ces records appréciés des connaisseurs : en 1961 déjà elle présentait une laine mérinos superfine affichant 1/120 (un kilo de laine donnant 120 mètres de fil), un titrage que de nombreuses sociétés de tissage et de filature ne sont toujours pas en mesure de fournir aujourd’hui.
En 1965 naissait le tissu Trofeo, une laine mérinos superfine servant aux costumes les plus habillés, en 1985 le High Performance, une laine superfine incroyablement légère et infroissable qui permit désormais d’utiliser la laine pour les costumes d’été, en ’96 le Cashco, mélange de coton et cachemire permettant ici encore de porter le velours en toute saison, en ’98 la laine Traveler absolument infroissable et le cachemire double face, nec-plus-ultra du genre…
Un siècle de recherche permanente pour proposer des tissus plus légers, plus fins, plus doux… une véritable profession de foi qui cache une recherche méthodique, presque maniaque, toute entière dévouée à la qualité des tissus. Cette dernière ne dépend en effet pas seulement de la qualité et de la longueur des fibres, mais aussi de leur douceur, leur uniformité et leur résistance.
Dans la foulée de l’Extrafine Wool Trophy
La première compétition dans le monde des fibres naturelles est créée en Tasmanie en 1963. Zegna l’étendra à l’ensemble du territoire australien en 1980, afin de stimuler la production de la meilleure laine mérinos du monde. Auparavant, la maison aura lancé le Trophée Mohair est en Afrique du Sud. En 1985 et ’86, Zegna transpose l’idée au cachemire avec le Trophée Cachemire en Mongolie Intérieure, mais le développement politique du gouvernement chinois met un terme à l’aventure.
Puis ce sera le Trophée Vellus Aurum, ou Toison d’Or, instauré en 2002 pour célébrer les laines de 13,9 microns et moins – une incitation à la quête de l’excellence pour les producteurs, le gagnant remportant l’équivalent du poids de la toison gagnante en or. Il voit depuis lors s’affronter les meilleurs producteurs australiens et néo-zélandais, et permet à Ermenegildo Zegna de disposer de fibres exceptionnelles.
Le style Zegna, mélange d’élégance, de confort et de raffinement
Dès son lancement en 1968, le prêt-à-porter Zegna privilégie une connaissance sérieuse des tissus, des coupes et des finitions, et s’adresse donc à une clientèle cultivée et raffinée. Tournant le dos au clinquant qui apparaît dans les années 70 et s’imposera durant la décennie suivante, il sera toujours discret et personnel, et prépare le terrain à l’activité mesure, lancée en 1972, qui propose aux clients une expérience de conception totalement personnalisée.
Tant par le dessin de ses coupes que par ses finitions luxueuses, la mesure Zegna s’impose d’emblée comme éminemment représentative de la couture et du style italiens, et fait tout de suite la différence avec la mesure traditionnelle telle qu’on la conçoit alors, en assurant des délais de fabrication de quatre à six semaines là où Saville Raw réclame habituellement quatre à six… mois.
Une marque engagée
Ermenegildo Zegna a toujours été convaincu que la qualité des produits était intimement liée à l’environnement – et notamment la beauté des paysages – et au bien-être des personnes impliquées – et notamment son personnel. C’est dans cet état d’esprit qu’il a conçu et financé les 25 km de route panoramique qui relie Trivero à Andrate et la reforestation de la zone (500 000 sapins, rhododendrons et hortensias), devenue aujourd’hui un parc naturel de 100 km2 baptisé Oasis Zegna. Le touriste y apprend à connaître, comprendre et respecter la nature via un système de signalisation présentant l’histoire locale et décrivant la faune, la flore et les minéraux.
La création de la fondation Zegna, en 2000, s’inscrit dans cette même perspective et vise à assurer la pérennité des valeurs et de la philosophie du père fondateur. A travers diverses missions de soutien au développement durable dans les communautés locales, à la recherche médicale et à la formation des jeunes, elle se consacre à la protection de l’environnement naturel, social et culturel, tant en Italie qu’en Inde, en Afrique de l’Est ou en Chine Intérieure.
Un peu d’histoire
C’est dans la seconde moitié du xixème siècle qu’angelo zegna (1859-1923) abandonne son métier d’horloger pour acheter quatre métiers à tisser et se lancer dans le tissage. Benjamin de ses dix enfants, ermenegildo (1892-1965) reprendra l’activité et zn fera l’une des entreprises les plus célèbres d’Italie. Il fonde la manufacture ermenegildo zegna à trivero (province de biella, au pied des alpes) en 1910 et commence à y produire les tissus qui portent son nom, sur les quatre métiers paternels. Ses tissus doivent déjà être, selon ses propres termes, « les plus beaux du monde ». Ayant déjà, bien avant tout le monde, une vision internationale de son activité, il décide de se procurer les meilleures fibres naturelles dans les pays où elles sont produites.
L’histoire lui donne raison : dès 1938 ses tissus s’exportent aux états-unis, et sont présents dans 40 pays en 1945. Décidément visionnaire, ermenegildo a aussi la fibre sociale, et tient à ce que son personnel travaille dans les meilleures conditions : dès 1932 la manufacture dispose d’une salle de réunion, d’une bibliothèque, d’un gymnase, d’une piscine et d’un cinéma, auxquels s’ajouteront bientôt un centre médical et une école maternelle. C’et à cette époque qu’il entreprend le chantier qui donnera lieu, plusieurs décennies plus tard, à l’oasis zegna en finançant une première route de 14 km et en plantant des milliers d’arbres.
Ses fils aldo (1920-2000) et angelo (1924) commencent à travailler avec leur père dès l’adolescence, mais suivront leurs études en Italie puis à l’étranger. Leur père leur confiera progressivement les rênes de l’entreprise au début des années 60. Ils lancent les activités prêt-à-porter et mesure, ouvrent une usine destinée à produire les collections à Novara en 1968, internationalisent la production et ouvrent les premières boutiques de la marque à Milan et Paris. Aussi préoccupés du bien-être de leurs employés et d’environnement que leur père, ils créent un lotissement résidentiel et une petite station de ski, et poursuivent le chantier de la route panoramique Zegna.
Leurs enfants Ermenegildo jr, dit Gildo (1955), Paolo (1956) et Anna (1957), dirigent aujourd’hui l’entreprise familiale, dont ils ont fait un empire en développant une stratégie de verticalisation et une diversification de la marque à l’échelle planétaire. Elle compte aujourd’hui 550 points de vente dans le monde, dont 300 en pleine propriété, et est présente dans 86 pays, notamment des les économies émergentes comme le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine, où elle possède 73 boutiques. Et l’histoire continue cette année encore, avec l’ouverture des boutiques de Las Vegas et de Shanghaï au mois de juillet, et les expositions du centenaire dans les magasins au mois de septembre.