Deux étoiles au Guide Michelin, un lieu chargé d’histoire
L’aventure a commencé à l’orée des années 2000 quand ils rachètent cette vieille bâtisse dont Ettore Bugatti en fit, en son temps, un havre de paix à quelques encablures des usines du constructeur automobile.
De leur histoire, se reflète une philosophie bien ancrée.
Chez ses deux alsaciens quadragénaires, la table se vit en sacerdoce, on prend le temps de bien faire, d’être précis dans les gestes : seulement 6 services par semaine, 30 couverts par soir.
L’écrin fourmille de jolis détails en cristal jetant un voile tamisé sur la pièce. Une grande salle donnant sur une plus petite tout en boiseries, destinée aux diners en amoureux, couronnée par une belle cheminée.
Passé l’impressionnant accueil, on observe alors avec plaisir le ballet millimétré se mouvoir autour de soi.
Il est plaisant de voir que la cuisine classique a encore ses lettres de noblesse. La partition de Nicolas Staam séduit par sa délicatesse : deux ou trois saveurs dans chaque assiette.
En mise en bouche, la gelée de lentilles, le raifort et le froie gras, enlève le tout et nous font entrer dans un joli univers.
Suivent alors les cuisses de grenouille et ravioles d’oignon, fondantes qui remplissent gentiment leur office.
Sur la même note, les escargots, le gâteau de pomme de terre et jaune d’œuf de caille, démontrent une cuisine émotionnelle à souhait.
En guise de plat, le pigeonneau parfaitement cuit monte crescendo, le cacao apportant sa touche d’originalité.
Mais le trait de génie est bien au moment du dessert. Le risque est beau, l’enjeu est grand. La tartelette au citron, la poire Belle-Hélène, le baba au Rhum. Que des classiques, connus de tous. Nos péchés mignons du dimanche midi après un copieux repas de famille. Il faut alors beaucoup d’assurance et une certaine dextérité pour tenter ce coup de Jarnac.
Et pourtant, à la première bouchée de Paris-Brest, l’admiration gagne les esprits. Un tour de force qui emmène la simplicité vers le sublime. Peu sucré, très léger, la pate craque sous la dent, la mousse fond en bouche.
Il y’a de cela dans les plats de Nicolas Staam. Une sagesse qui gagne sur la tempête. Une cuisine d’esprit et l’amour du geste accompli qui l’emportent sur les créations jusqu’au-boutistes.
Définitivement, l’adresse vaut le voyage. A tel point, qu’aussitôt la dernière madeleine engloutie, on esquisse un sourire, déjà mélancolique.
PHOTOS EXTRAITES DU LIVRE « NICOLAS STAMM, UN CHEF EN ALSACE »,
PARU EN OCTOBRE 2013 AUX EDITIONS GRüND.
CREDITS PHOTOS JOERG LEHMANN / OLIVIER BUHAGIAR
La Fourchette des Ducs
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Ouvert le soir du mardi au samedi et dimanche midi.