Des fragrances masculines pas comme les autres
Mais l’ombre de Louis Panafieu, créateur des parfums de l’Empereur et de la fameuse Pommade des Mousquetaires (comme son nom ne l’indique pas un baume destiné à fixer les moustaches laquées), plane sur son arrière-petite-fille, qui réalise bientôt que la seule passion qui la transporte autant que celle qui l’anime pour le parfum est celle qu’elle éprouve pour… les roses. Dans sa propriété picarde, la directrice marketing international des parfums Balmain entretient une roseraie dans laquelle elle plante, coupe, taille et élève de multiples espèces.
Elle franchit le Rubicon en 1991 en créant Les parfums de Rosine, entreprise doublement audacieuse puisqu’au positionnement de la marque sur la niche encore embryonnaire des parfums de créateurs s’ajoute la caractéristique fondamentale de proposer exclusivement des fragrances élaborées autour de la rose. Le pari est particulièrement audacieux. Il s’accompagne de l’ouverture d’une « boutique écrin » Galerie Montpensier, sous les arcades du Jardin du Palais Royal.
Ce sera un pari gagné, car Les Parfums de Rosine trouvent immédiatement leur public. De fait, Marie-Hélène Rogeon ne conservera pas très longtemps le poste à la direction marketing internationale des Parfums Caron qu’elle a accepté (durant l’exercice duquel elle montera le parfum Pour un homme de la 15ème à la 9ème place sur le marché français) et en démissionne pour se consacrer exclusivement à ses Parfums de Rosine en 1996.
Elle va démultiplier son offre en développant de nouveaux accords, Roseberry et Rose d’Eté venant rapidement renforcer La Rose de Rosine. Une quinzaine d’années plus tard, la marque compte aujourd’hui 17 fragrances, déclinées en eaux de parfum, en savons parfumés, crèmes pour le corps et bougies parfumées.
Trois d’entre elles sont des fragrances masculines. Dès 2005 en effet, Marie-Hélène Rogeon décide d’ouvrir son univers olfactif à l’homme. Un pari de nouveau risqué, tant l’image de la rose est profondément assimilée à la femme. La maison surmonte la difficulté en appréhendant l’accord autrement, sans passer par le chemin a priori incontournable de la construction tête-cœur-fond. Résulte de cette approche un parfum de rose audacieux et viril, éminemment masculin. Le succès est cette fois encore immédiat, et Rose d’Homme sera suivi de Twill Rose en 2006, puis de Rosissimo en 2010. Ici encore, le parfum sera suivi d’un savon sur corde puis de bougies parfumées, aussi opportunes dans un bureau que sur la table d’un dîner romantique ou dans une salle de bain.
A l’heure où la conjoncture économique a tendance à nous ôter le sourire, Les Parfums de Rosine ne connaissent pas la crise. Une performance autant due à l’originalité de la collection qu’à son développement à l’international, où la société réalise aujourd’hui 75% de son chiffre d’affaires.
Présente dans une trentaine de pays à travers quelques 350 points de vente, la marque s’est même payé le luxe, l’année dernière, de créer un parfum exclusivement dédié au marché japonais : La Rose Pêche. Un féminin, de nouveau. Mais soyons sans crainte : Rosine sait désormais qu’elle compte aujourd’hui nombre de clients sensibles à ses créations rares et raffinées ; elle ne nous oubliera plus.