Comme pour expliquer leur triste mise, les esprits chagrins nous assurent régulièrement qu’être bien habillé coûte cher et est réservé aux plus aisés. Sous-entendu : je ne m’habille pas comme un sac parce que je n’ai pas de goût, mais parce que je ne suis pas riche. La bonne blague. N’en déplaise à ces tristes sires, s’habiller élégamment relève d’abord et avant tout du respect de soi et d’une inclination avérée – innée ou apprise – pour l’harmonie et l’esthétique.

Nos lecteurs fidèles ont ainsi l’habitude de voir se côtoyer dans nos pages réalisations grande mesure prestigieuses et fabrications industrielles, proposées à des tarifs incomparables mais répondant à un même désir d’élégance et d’affirmation de soi. Profitons d’ailleurs de l’occasion pour remarquer que le troupeau de ceux habillés de costumes passe-partout gris ou bleu marine hors de prix mais dûment estampillés, se porte toujours extrêmement bien, merci pour lui.
A l’inverse de ce raz-de-marée universel, diverses petites maisons s’ingénient à nager à contre-courant et proposent encore et toujours des tenues conçues en dépit de l’uniforme costume sombre-chemise blanche imposé par la mode. Or si beaucoup de ces maisons sont positionnées haut de gamme, quelques unes d’entre elles ont au contraire choisi de s’adresser au plus grand nombre, et permettent de s’habiller avec recherche sans disposer de moyens importants.

Démonstration par l’exemple avec ce costume Wicket en flanelle de laine super 120 à motifs pied de poule à gros carreaux rouges. On remarquera la coupe croisée six boutons, les deux grandes fentes dos, les poches plaquées, les revers années 30, les boutonnières ouvertes aux manches. Invisible sur notre photo : la coupe droite du pantalon, qui affine la silhouette. A l’intérieur une doublure demi-dos, des poches passepoilées et une emmanchure rouge vermillon soulignent le caractère de l’ensemble.

A 690 euros le costume, qui reprocherait à l’habilleur de ne pas monter en entoilage volant ou de ne pas utiliser les meilleures étoffes de Loro Piana ou Scabal ? Nous avons plutôt tendance, pour ce qui nous concerne, à applaudir à deux mains ce genre de création qui permet notamment aux plus jeunes d’opter pour un vrai style plutôt que de se fondre dans le moule grégaire de la dilution de la personnalité qui rend nos centres-villes si monotones. Et accessoirement, à apprécier le clin d’oeil de Wicket, qui a mis Dandy dans les mains de son mannequin : la maison s’adresse définitivement aux gens de goût !